Les seniors, des salariés particuliers ?
L’espérance de vie augmente, la santé des Français s’améliore, nos régimes d’assurance vieillesse vont mal, il est donc demandé aux Français de travailler plus longtemps. Parallèlement, il est également constaté que les personnes de plus de 50 ans sont davantage touchées par le chômage. Nombreuses sont les mesures qui ont donc été prises pour favoriser l’embauche des seniors, les inciter à maintenir leur employabilité et améliorer leur deuxième partie de carrière.
A partir de quel âge est-on senior ?
De nombreux dispositifs visent spécifiquement les seniors, mais aucun texte ne précise l’âge à partir duquel un salarié est considéré comme « senior ».
Concrètement, cet âge varie d’un texte à l’autre.
Ainsi :
- le contrat de professionnalisation permet des exonérations de cotisations sociales aux employeurs qui embauchent un demandeur d’emploi de 45 ans et plus ;
- le CDD senior s’adresse aux personnes de plus de 57 ans ;
- la loi sur la réforme de la formation professionnelle impose qu’un entretien soit mené avec tout salarié âgé de 45 ans ;
- l’accord collectif ou le plan d’action en faveur de l’emploi des seniors que les entreprises ont dû conclure ou établir en 2010 devait traiter du maintien dans l’emploi des salariés de 55 ans et plus et du recrutement des salariés de 50 ans et plus ;
- le contrat de génération vise le maintien dans l’emploi d’un salarié âgé d’au moins 57 ans ou d’au moins 55 ans s’il est nouvellement embauché ou reconnu travailleur handicapé.
Par ailleurs, la loi n’a jamais fixé d’âge limite pour arrêter de travailler.
La seule limite est celle que l’on peut trouver dans l’article L 1237-5 du Code du travail qui précise qu’un employeur ne peut mettre un salarié à la retraite avant 65 ans (progressivement relevé à 67 ans) sans son accord. La loi l’autorise, en revanche à mettre un salarié à la retraite d’office à partir de 70 ans.
Conclusion : un senior est une personne d’un âge tout à fait variable selon les textes, allant de 45 ans à au moins 70 ans.
Deux grandes séries de mesures concernent les seniors
Les gouvernements successifs ont pris deux grandes séries de mesures concernant les seniors :
1 – des mesures destinées à favoriser leur emploi et/ou maintenir leur employabilité ;
2 – des mesures pour aménager leur fin de carrière et favoriser leur bien-être au travail.
1 – Favoriser l'emploi des seniors et/ou maintenir leur employabilité
Le contrat de professionnalisation
Depuis le 1er janvier 2008, l’embauche d’un demandeur d’emploi de 45 ans et plus ouvre droit à :
- une exonération spécifique des cotisations patronales au titre des assurances sociales et des allocations familiales ;
-
une aide forfaitaire de l’Etat de 2 000 € pour un temps plein.
Le contrat à durée déterminée « senior »
Ce CDD peut être conclu avec toute personne âgée de plus de 57 ans et inscrite depuis plus de 3 mois comme demandeur d’emploi ou bénéficiant d’une convention de reclassement personnalisé (CRP) (devenue CSP).
L’objectif de cette mesure est de faciliter le retour à l’emploi des seniors et de leur permettre d’acquérir des droits supplémentaires en vue de la liquidation d’une retraite à taux plein.
Le contrat de génération
Ce dispositif a été créé dernièrement (Loi 2013-185 du 1er mars 2013 et décret 2013-222 du 15 mars 2013) pour favoriser l’embauche des jeunes et maintenir l’emploi ou favoriser l’embauche des seniors (voir LMA n° 311). Il se traduit par l’obligation de conclure un accord collectif intergénérationnel ou, à défaut, d’établir un plan d’action pour les entreprises de 300 salariés et plus, de même pour celles de 50 à 300 salariés si elles souhaitent bénéficier de l’aide financière de l’Etat.
Le cumul emploi-retraite facilité
Le cumul emploi-retraite, assoupli en 2003, est totalement libre depuis le 1er janvier 2009. La possibilité de cumuler un emploi et une retraite est possible, sans aucune limitation de montant, à condition :
- que l’assuré remplisse les conditions pour pouvoir prétendre à une pension à taux plein ;
- qu’il ait liquidé l’ensemble de ses pensions de vieillesse personnelles de base et complémentaires ;
- qu’il ait cessé son activité professionnelle (et reprenne une activité salariée, y compris chez son dernier employeur).
La retraite progressive
Pérennisée par la loi du 9 novembre 2010, elle permet à un assuré de bénéficier, sous certaines conditions, d’une fraction de sa pension vieillesse tout en poursuivant une activité professionnelle à temps partiel auprès de son employeur.
L’assuré doit avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite pour faire liquider sa pension et justifier au minimum de 150 trimestres d’assurance vieillesse et de périodes reconnues équivalentes.
Différentes autres mesures ont été mises en place progressivement pour inciter les seniors à poursuivre leur activité professionnelle :
- un mécanisme de surcote de la pension de retraite de base ;
- une aide différentielle de reclassement accordée par Pôle emploi aux allocataires de 50 ans et plus qui reprennent un emploi salarié dans une entreprise différente de celle où ils exerçaient leur emploi précédent (en cas de salaire inférieur à la dernière rémunération) ;
- l’obligation pour les entreprises de prendre des engagements tant quantitatifs que qualitatifs concernant les seniors ;
- la suppression des dispositifs de préretraite ;
- la suppression de la dispense de recherche d’emploi pour les demandeurs d’emploi d’un certain âge ;
- la suppression de la possibilité de mettre un salarié à la retraite dès 60 ans.
2 – Aménager la fin de carrière des seniors et favoriser leur bien-être au travail
L’entretien professionnel de deuxième partie de carrière
Rendu obligatoire dans les entreprises de 50 salariés et plus par la loi du 24 novembre 2009, il doit être organisé par l’employeur dans l’année qui suit le 45e anniversaire du salarié.
Il a pour objet de faire notamment le point sur les compétences du salarié et ses besoins en formation, lui permettant ainsi d’anticiper sa deuxième partie de vie professionnelle.
L’obligation de négocier sur l’emploi des seniors pour les entreprises de plus de 50 salariés
Instaurée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 avec une mise en œuvre au 1er janvier 2010, cette mesure a été remplacée par celle issue du contrat de génération relativement à la mise en place d’accords collectifs intergénérationnels ou de plans d’action.
Cette négociation est obligatoire dans les entreprises de 300 salariés et plus sous peine de sanction financière. Dans les entreprises de 50 à 300 salariés, elle conditionne seulement l’octroi de l’aide financière de l’Etat.
Une vigilance accrue concernant la santé et la sécurité au travail des seniors
Le taux de retour à l’emploi des seniors étant en progression, nombreux vont être les employeurs à avoir cette classe d’âge parmi leurs salariés. Il est prudent de rappeler que tout employeur est tenu d’une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de son personnel. Cette obligation vise tous les salariés mais, concernant des salariés vieillissants pouvant être fragilisés, elle prend toute son importance.
La recherche de l’amélioration des conditions de travail et la prévention des situations de pénibilité ne peuvent que contribuer au maintien dans l’emploi de cette catégorie de salariés.
Pour ce faire, les employeurs doivent s’appuyer sur les outils existants : le document unique relatif à l’évaluation des risques professionnels, la fiche individuelle de suivi des salariés exposés à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels, etc.
Les entreprises doivent, par ailleurs, être particulièrement vigilantes quant au suivi médical des salariés seniors.
Indépendamment de la visite périodique obligatoire tous les 24 mois, les employeurs ont tout intérêt, concernant les seniors, à renforcer leur surveillance médicale en organisant, comme la loi les y autorise, des visites médicales complémentaires devant le médecin du travail (C. trav. art. R 4624-17).
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